Escadron BRAVO & Cie

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Avis de vent d'Est



Novembre 1975               en Word     en Pdf

Être de garde, pour moi c'est avoir cette impression de veiller sur la sécurité de tous...

Au quartier, la journée est souvent agitée et rythmée par les allées et venues de tout le microcosme de notre garnison éloignée.

 

Influencée par les conflits passés, notre vie est régie par les exigences d'une guerre qui ne dit pas son nom.

Notre présence dans cette caserne, édifiée sous le régime nazi, trouve son origine dans la confrontation Est/Ouest née de la fin de la seconde guerre mondiale.

 

Être de garde à Hellefeld c'est assez différent, il y règne un calme austère et parfois oppressant.

Au-delà des clôtures, le bruit du vent dans la cime des épicéas constitue quasi l'unique fond sonore.

Le dépôt de munitions est vaste comme un petit village et très isolé sur un plateau boisé nommé "Hellefelder Höhe" à une bonne dizaine de km à l'Est d'Arnsberg.

Il est composé de plusieurs dizaines d'abris scellés remplis de munitions stockées au cordeau selon des normes strictes et destinées aux unités sensées monter au combat en cas d'alerte réelle.

 

La monotonie est brièvement rompue au moins une fois par jour par l'arrivée de la jeep de "piquet" apportant notre ravitaillement suscitant un concert d'aboiements issu de l'enclos des chiens.

 

Mon rôle de chef de poste pendant 24h00 consiste à donner un timing et à superviser le déroulement de la surveillance par les sentinelles  maîtres chien allemandes (MOC*) dont c'est le métier.

Je peux décider de participer à certaines rondes ou en faire seul (sans les chiens).

Le corps de garde est scindé en deux parties autonomes dont une réservée au chef de poste avec vue sur la grille d'entrée et l'enclos des chiens, la seconde étant destinée aux gardiens allemands dans la partie latérale et arrière du pavillon.

Seule une lucarne percée dans le mur séparant les deux zones permet la communication.

Je dispose d'une radio et d'un téléphone pour rester en contact avec le quartier.

 

Le temps défile lentement rythmé par les rondes des gardiens ou les miennes et cela me laisse beaucoup de temps pour méditer sur mon rôle qui peut sembler dérisoire au profane mais que je prends très au sérieux.

Conscient de n'être qu'un tout petit rouage dans le mécanisme de défense de l'OTAN je ne me fais aucunes illusions quant à notre vulnérabilité en cas d'attaque surprise mais cela n'entame pas ma détermination.

 

En 1975, alors que je fais ma ronde entre les abris, je n'imagine pas encore que la crainte d'une conflagration tant redoutée va subitement s'évaporer un peu plus de quinze ans plus tard suite à l'implosion du système soviétique.

 

Aujourd'hui en écrivant ces lignes je sais qu'il ne subsiste que quelques ruines, vestiges du dépôt munitions d'Hellefeld démantelé depuis et où la nature a repris ses droits.

 

En ce début d'année 2022 il semble bien que l'histoire bégaie car le maître actuel du Kremlin n'a pas digéré de s’être fait confisquer la guerre froide ainsi que la sphère d'influence sans partage que l'URSS avait hérité de la volonté de Staline.

Sans doute les gouvernants occidentaux n'ont pas saisi les opportunités de cette nouvelle donne n'y voyant que des économies à faire sur les dépenses de défense.

Au final on se retrouve presqu'à la case "départ" avec une Russie revancharde comme le fut l'Allemagne suite au traité de Versailles.

S'agit-il d’une énième intimidation ou d'une réelle menace?

 

Tontons Adolf et Josef doivent bien rigoler.

 

* Main d'œuvre civile.

 

CENIER Maurice  le 05/02/2022



05/02/2022
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